Sur des sentiers inexplorés

Gipsy – Nihahsah:

Même s’il a pris le temps de faire les premiers soins auprès de Nihahsah, Dajan reste cloitré dans une forme de mutisme une fois que Maman Abigail vous a laissé poursuivre votre route pour rejoindre le village lacustre en ruines. Il faut dire que l’environnement dans lequel vous avancez invite à la prudence. Les odeurs de la forêt sont pénétrantes : humus, bois aux senteurs exotiques, humidité… Mais le tout est enveloppé d’un silence troublant pour ceux qui connaissent la réalité des forêts primaires de Gaïa. Peu à peu, ce silence pénétrant vous gagne et vous continuez à avancer jusqu’à ce que les arbres gigantesques, qui plafonnent sur un ciel aux constellations vives et lumineuses, commencent à s’éclaircir jusqu’à s’ouvrir sur un vallon qui suit le cours d’une rivière aux eaux stagnantes. Des roseaux à la taille anormalement grande  bordent le lit de la rivière, tandis que le vallon semble être un îlot au cœur d’une forêt infinie…

L’endroit est pour le moins incongru, et comme importé au hasard dans le décor que vous avez traversé jusque-là. Il est en tout cas reposant, et vous vous sentez moins oppressés ici.

Noomi:

Tu observes patiemment la suite des évènements jusqu’à l’arrivée des Ovides. Ils sont trois, dont le jeune Dajan et la femme-Lézard. Comme souvent, Mère Ananasa a vu juste. La surprise vient néanmoins de la présence d’un troisième voyageur que tu ne connais pas. Occidental à son allure. Tu n’as pas vraiment le temps de poursuivre ton observation, car un évènement pour le moins problématique se produit…

Tous:

Sous vos yeux émerveillés et/ou effrayés, la rivière (ou du moins ce qui ressemblait à une rivière) s’ébroue avant de s’enrouler sur elle-même à la manière d’un serpent. Le corps longiligne semble liquide et solide à la fois, variation entre le bleu et le brun, ses formes sont mouvantes tandis qu’il se redresse jusqu’à atteindre la hauteur de la canopée des arbres qui encerclent le vallon. La tête de la créature est une sorte de croisement improbable entre un aigle et une tortue. Il se tourne alors vers votre groupe :

- Vous entrez dans mon domaine, étrangers. Avez-vous amené avec vous le droit de passage ?

Avec une rapidité surprenante, la tête se projette dans votre direction avant de s’arrêter à moins d’un mètre de votre position. L’expression de ce visage étrange semble pleine de curiosité, mais aussi d’une forme d’avidité.

Ne parvenant toujours pas à changer de forme pour une raison que j'ignore et qui m'effraie, je continue de marcher en serrant les dents, endurant des blessures que je n'ai pas vraiment l'habitude de devoir subir. Dans l'oeil d'une tempête qui rugie autour de moi je ne peux m'empêcher de ressentir une intense culpabilité ; je suis la survivante de cette démence dont l'ombre c'est étendue jusqu'à chez nous, déjà les noms de ceux qui sont tombés et dont les espoirs de n'être pas mort en vain flottent au-dessus de moi comme autant de fantômes. Je suis la survivante et qui de mieux que moi pour se souvenir de leur sacrifice, gravant leurs noms dans ma Mémoire. Léa, Djibril, Papa Opeyemi, Maman Abigail et les siens... Je suis la survivante, et je ne sais plus ou j'en suis, je suis tellement perdue que je ne sais même plus pourquoi les larmes coulent sur mes joues.

C'est l'évolution étrange de notre environnement qui me tire de ce silence introspectif angoissant. J'inspire à plein poumons les odeurs de la forêt, mais le silence me laisse dans une fébrilité prudente. J'observe le vallon avec des sens maintenus alertes par la douleur et je me retrouve frappé par cette étrangeté, me souvenant des dernières paroles de Maman Abigail : "Si vous poursuivez votre marche dans cette direction, vous pénétrerez dans un reflet de la terre des Sauriens"

Sans que je ne m'en sois rendue compte, mon angoisse, mon stress, ma tristesse se sont allégés, m'offrant un désiré répit et me permettant de me concentrer sur ce qui nous entoure. Mes yeux s'ouvrent grand lorsque je comprend que nous avons probablement pénétré dan un reflet de la Terre-mère, peut-être même celui des sauriens qui doit se trouver cans ces bois. Et lorsque la rivière se met à se mouvoir, mes yeux s'ouvrent encore plus et ma bouche reste ouverte sur un "euh" muet. J'ai du mal à retenir une tentative de me reculer lorsque l'esprit se précipite vers nous, la douleur que j'avais se rappelant à moi et me faisant tomber sur mon séant, la peur laissant place au soulagement lorsque l'esprit s'arrête.

Je me relève tant bien que mal en regardant mes compagnons à la demande de notre interlocuteur, cherchant à savoir s'ils ont plus d'idée de quoi sur ce que pourrait bien désirer l'esprit, mais consciente qu'il y a peu de chance que ce soit le cas. Je fais fonctionner mes méninges à toute vitesse pour essayer de savoir ce que cela pourrait être essayant de gagner du temps le temps d'y parvenir. Cependant Gaïa a mené mes pas jusqu'ici, car tel était mon besoin et je ne souhaite pas duper le gardien de ces lieux, je m'adresse à lui avec ferveur.

"Esprit gardien ! Nos anciens et la volonté de la Terre-mère ont permit a nos pas de nous mener vers ton domaine, car c'est par là que l'alliance solaire pourra à nouveau prendre vie. Mais nous ne savons pas quel est ce droit de passage. Consentirais tu à nous en informer afin que nous puissions corriger notre ignorance et t'offrir ce qui te revient ?"