La quête de l'Alliance Solaire

Susiliwati conduit Nihahsah et Gipsy vers la terrasse. En femme forte, le seul indice de la tristesse qui l’habite est une démarche légèrement hésitante. Arrivés sur la terrasse, vous trouvez deux africains l’un à côté de l’autre, dans un silence reposant après la fureur de la ville. L’un des deux, un peu avachi sur lui-même semble venir d’un autre temps dans son pagne fatigué. Le second, plus jeune, n’est autre que Dajan que Nihahsah a déjà rencontré.

Susiliwati considère un bref instant Dajan, avant de s’agenouiller auprès du vieux Opeyemi pour se tenir à ses côtés.

- Mon fils… Sa gorge est encore nouée par le chagrin, mais elle poursuit avec courage… mon fils est tombé Papa. Je ne savais pas où aller pour chercher conseil.

Le vieux Opeyemi hoche la tête, mais garde le silence.

- Nihahsah, dis-nous ce qu’il s’est passé, demande donc Susiliwati.

Tous les regards se portent alors sur la jeune africaine.

Je fais un signe de la main accompagné d'un salut de la tête à Dajan, le cœur lourd et guère capable de plus. Je m'assoie en tailleur laissant de la place à tout le monde tandis que les regards finissent par se poser sur moi. J'inspire plusieurs fois, longuement, dans un silence pesant avant de finalement commencer à prendre la parole.

Comme je vous l'avait dit... je commençais à peine mais je m'arrête, regardant Gipsy avant de reprendre en me grattant la gorge qui est serrée comme jamais. Je reprend d'une voix rauque. Mon frère, qui c'était infiltré chez Total pour essayer de comprendre ce qui était arrivé à notre père qui a beaucoup changé depuis qu'il à été employé dans cette entreprise, m'avait appelé pour m'entretenir de ce qu'il avait appris à son propos. Il semblait très mal.

Lorsque je suis arrivée au lieu du rendez vous, sur les docks j'y ai rencontré Gipsy Fils-du-Vent et son amie Léa, deux garou qui venaient de la où je me rendait. Il m'a informé du décès de Djibril et nous avons été pris en embuscade peu après par des suppôts du Ver que nous avons détruit. Je semble hésiter l'espace d'un instant et me reprend. Nous avons vu un Rokéa, qui nous à adressé un mot unique. Je ne l'ai pas compris même si je suppose qu'il souligné la présence du Ver avant de repartir dans les eaux des docks... Qui sont un véritable enfer, une fosse à Flaïels s'y trouve Papa Opeyemi, si près de chez nous. Léa à perdue la vie durant le combat, dans l'Umbra et nous venus ici ne sachant pas trop où aller, ni que faire...

J'ai parlé lentement, respirant peu. finalement je reprend un peu mon souffle, laissant les différentes personnes en présence prendre en compte ces informations.

Je me dresse lorsque je vois les phares arriver. J'ai beau avoir confiance dans la parole de l'ancienne, rien ne sert d'être pris au dépourvu. La tension m'habite lorsqu'elle s'arrête, prêt à bondir sur l'assaillant si jamais il s'avère que ça en est un. Mais en fait, je vois Nihahsah en descendre et je me relâche. Je m'apprête à aller à sa rencontre lorsque je vois l'état de l'autre femme et le regard de celle que je suis venu retrouvé.
Leur peine m'annonce clairement qu'il y a un problème. J'hésite à réconforter la jeune femme, mais n'en fait rien. ce n'est pas le moment de lui laisser penser que je la vois comme faible, ce qui serait erroné.
Par contre la tension réapparait aussitôt que celui qui les accompagne passe dans un rayon de lumière.

*Qu'est ce qu'elle fait avec un blanc?*

Seules les règles de l'hospitalité m'empêchent de m'interposer et de le renvoyer d'où il vient. Et je ronge donc mon frein, debout, silencieux, me tenant prêtau moindre travers de cet occidental qui n'a rien à faire sur notre territoire.

Puis Nihahsah commence son récit et je sers les dents pour ne rien dire. Cependant on peut lire dans mon regard une méfiance frôlant la haine alors que ej ne quitte pas des yeux ce blanc.
Cependant j'écoute ce que celle qu'on a mis sur mon sentier a à dire. Et cela m'en apprend d'avantage sur sa situation. Il est d'ailleurs étonnant de voir la compassion que j'éprouve pour elle alors que je suis capable d'un sentiment inverse dès que mon regard se pose sur ce Gipsy Fils-du-vent. La seule chose qui atténue un peu mon dégoût de voir ce loup ici, est qu'une des leurs est morte en combattant. Mais qu'attendre ceux-là...

Cependant pour l'instant ce n'est pas à moi de parler, donc je me tais et attends le moment opportun pour intervenir.

Sans hésitation mais avec un fond de tension qui me raidit les articulations, je sors du véhicule pour découvrir les trois personnes assises vers lesquelles mes deux compagnes de voyage se rendent. Je les examine tour à tour, sans les dévisager pour autant, avant de me décider à avancer également.

Ne les connaissant pas, je les laisse m'observer tout leur comptant, alors que de mon côté j'attends le moment opportun pour adresser un salut de la tête à l'ancien d'abord, puis aux deux autres, car je connais l'importance de respecter ce genre de convenances où que ce soit.

Autant ce que je lis dans les regards calmes et plutôt bienveillants du vieil homme et de la femme me poussent à laisser venir un timide sourire au coin de mes lèvres, autant la haine mal canalisée à mon encontre qui exsude de l'intimidant troisième invité le tue dans l'oeuf. Sans connaître sa nature exacte, ce premier contact me confirme si besoin en était après mes discussions avec Nihahsah, que je n'aurais probablement guère d'occasions de faire des rencontres autrement que sur le ton des reproches et des ressentiments. Soit, j'y suis préparé, mais mon coeur de Chante-conte reste meurtri à cette idée, même si bien sûr je cache ce sentiment au plus profond de moi.

Je laisse les deux femmes s'installer d'abord, avant de le faire moi-même. Je me pose dans le cercle, humblement, les jambes croisées, et j'attends tout simplement que l'on me donne la parole. Le fonctionnement de cet endroit me rappelle celui d'une Assemblée. L'étranger que je suis où que j'aille a dû mille fois peut-être savoir rester à sa place et trouver le moment opportun pour intervenir, lorsque les hôtes lui donnent cette occasion.

Je suis donc avec intérêt le récit de la jeune africaine, le regard brillant d'émotion, la mâchoire serrée, le regard braqué sur la terre rouge du sol. Quand elle termine, je me tiens prêt à intervenir si tant est qu'on m'y invite.

C’est un silence pesant qui s’installe après le résumé effectué par Nihahsah. La tension est palpable entre certains acteurs, tout comme le désarroi de la plupart. Le croassement des crapauds et le bruit de la jungle toute proche forme un curieux mélange qui ajoute à la mystique de l’instant. Les yeux laiteux du vieux Opeyemi reflètent étrangement les lueurs du feu qui vous nourrit de sa lumière lorsqu’il s’agite un peu pour redresser son dos voûté. Sa voix est emprunte d’une autorité naturelle, même portée par un corps devenu chétif et faible.

- Ceux de mon peuple se souviennent. Ainsi est la tâche que nous a confié la Terre-mère. Il est temps pour vous aussi, jeunes enfants, de vous souvenir. Il appelle alors en direction de la cabane silencieuse : Maman Abigail, rapportes-moi mes affaires.

La vieille femme au visage parcheminé arrive quelques instants plus tard avec une boîte d’ébène rectangulaire sur laquelle ont été gravées des représentations naïves de sauriens. Le vieux Opeyemi l’ouvre et en extrait plusieurs petits récipients  dans lesquels figurent des herbes aux senteurs riches. Il vous tend à chacun l’un des récipients avant de vous intimer d’y mettre le feu à l’aide du foyer autour duquel vous êtes assemblés. A votre surprise, les herbes s’embrasent facilement, mais se consument lentement. Leur odeur, puissante et musquée, flatte immédiatement votre odorat, vous poussant à fermer les yeux pour en apprécier tout l’arôme. Lorsque vous les rouvrez, le monde est différent mais la voix de papa Opeyemi bruisse toujours à vos tympans, et ses mots prennent vie dans une vision que vous partagez tous.

- Bien avant l’âge des hommes, les Rois Sauriens régnaient sur les territoires de la Terre-mère, gardiens du temps et de l’espace, ils étaient la sauvegarde des créations de Gaïa , leur mémoire. Déjà les autres change-formes parcouraient ce monde, car chacun avait son rôle à jouer. Il y avait là les loups, les lions, les ours et les chauve-souris… Et d’autres aussi, comme ceux qui régnaient sur les océans là où nous ne pouvions nous rendre. Tout était équilibre. Et puis il vint.

La vision de ces territoires où tout semblait serein s’estompe pour laisser la place à une pluie de météores sur lequel la forme d’un visage pétri de haine, de colère et rancune apparaît de temps à autre.

- Il a traversé l’Umbra, ivre de sa propre haine, poussé par la puissance du Grand corrupteur. Son arrivée a détruit le monde tel qu’il était, ravagé ce que nous avions pendant si longtemps préservé. Ce monde ne vit plus aujourd’hui que dans la Mnesis. Il n’est plus.

Un sentiment de profonde tristesse vous envahit, avant que le vieux Mokolé ne fasse renaître l’espoir dans vos cœurs meurtris :

- Mais les enfants de Gaïa ne baissèrent pas les bras. Sous la houlette d’un des Rois Sauriens déchu par l’arrivée de l’esprit, une couvée de nombreux change-formes se rassembla et s’unit autour d’une quête commune : un artefact de l’Umbra qui leur permettrait de vaincre l’Esprit corrompu. Leur quête les mena à travers les royaumes umbrales et de nombreux dangers, mais ils trouvèrent l’artefact. Sa puissance leur permit de séparer l’enveloppe terrestre de l’Esprit de son essence spirituelle, enfermant la première dans le corps de Gaïa et emprisonnant la seconde dans les limbes de l’Abysse. L’Esprit disparu de notre monde, et son influence s’effaça peu à peu. Un nom fut donné à cette couvée : l’Alliance solaire, car il est dit que l’artefact  qu’ils utilisèrent était fait de l’essence même de l’astre solaire.

Lentement votre vision s’échappe, ne laissant dans votre mémoire que la forme incertaine d’un long bâton de bois noir cerclé d’anneaux d’or. Vous reprenez pied dans la réalité, le bruit de la jungle envahit à nouveau votre espace sonore.
Le vieux Opeyemi s’est à nouveau voûté, comme fatigué par quelque effort.

- Ainsi est ce qu’enseigne la longue mémoire de notre peuple. Ainsi est la menace qui pèse à nouveau sur la Terre-mère. Certains veulent réveiller cette puissance et mener l’Apocalypse sur notre temps, comme ils le firent avec celui des Rois Sauriens.

Il redresse un peu la tête, comme pour vous contempler un à un malgré son regard aveugle.

- Mais je vois ici le lion, le dragon et le loup. Et le requin veille à sa manière. Je vois l’espoir, car vous portez en vous l’héritage de l’Alliance solaire.

Il tousse un peu, seul bruit qui vient troubler un court instant le silence qui retombe entre vous.

Je ne suis pas intimidé malgré les coutumes inconnues de mes hôtes. Cela dit, une grande partie de ma personnalité s’est construite sur les voyages incessants, les rencontres plus ou moins bonnes et un esprit ouvert et aventureux.
Pour cette raison peut-être je ne tarde pas malgré la gravité du moment à me sentir plus à l’aise, jusqu’à laisser un sourire timide et respectueux illuminer mes traits fatigués alors que mon regard intense et convivial est accroché sur le vieil homme et sa compagne.

Quand le "matériel" a été apporté et que les herbes sont sorties pour être brûlées, je m’installe plus confortablement, en ramenant mes jambes croisées plus près de mon corps et en bougeant doucement mon dos pour relâcher mes muscles, comme si je m’attendais quelque peu à l’objectif de ces préparatifs.
Mon sang de Chante-conte ne fait qu’un tour en effet, lorsque le vieil Opeyemi commence son histoire, dans laquelle il nous plonge littéralement.
Mes yeux brillent d’intérêt et de curiosité, mêlés parfois de colère ou de regret, mais tout mon être est comme accroché à ses paroles que je bois sans m’en cacher. J’ai pourtant une certaine habitude des Assemblées si extraordinaires de ceux qui partagent mon auspice, mais à chaque fois je me laisse transporter par ces évocations, fussent-elles, comme c’est trop souvent le cas, porteuses de nouvelles que nous préfèrerions ne jamais entendre.

Et tragiquement c’est une nouvelle fois le cas, même si au regard des évènements qui viennent de se produire, de nos découvertes, et de la prophétie de Hérisson, je n’y vois rien de surprenant.
En fermant les yeux je laisse mes sens me revenir doucement, restant accroché à ces images du passé, où d’ailleurs nous tous étions alors unis sous une même bannière, cherchant à figer dans ma mémoire le moindre détail et le moindre mot pour que dans l’avenir en persiste l’écho.
Jadis, un monstre perverti est venu pour provoquer l’Apocalypse, et il fut vaincu. Aujourd’hui nos ennemis cherchent à ressusciter ce mal, mais…

D’une voix ferme et douce à la fois, je prends la parole après avoir laissé sa part au silence qui s’est instauré après le conte, et m’adresse à l’ancien.
Je te remercie de ton accueil et de cette histoire terrible et magnifique à la fois. Et je suis justement venu jusqu’ici pour représenter les loups et offrir mon aide afin de lutter contre un ennemi puissant qui pourrait tous nous condamner.
Je joins mes mains levées l’une contre l’autre, les approchant de mon visage, en m’inclinant un bref instant.
Hérisson a parlé aux miens, loin d’ici, et je te donne ainsi qu’à tous ceux ici présents ma parole qu’en dépit du passé, ce qui m’amène ne comporte aucune arrière-pensée. Que la dépouille de ma sœur tombée dès nos premiers pas sur cette Terre en témoigne.
Je m’arrête sur ces derniers mots, les yeux légèrement brillants, gardant ce petit sourire triste qui semble me caractériser.

C'est avec respect que je participe au rituel invoqué par papa Opeyemi, lui qui à vécu si longtemps et vu ou rêvé tant de choses. Comme Gipsy je m'assoie en tailleur, le dos droit tout en faisant le vide dans ma tête afin de pouvoir pleinement me concentrer sur ce qui va suivre. S'en suit l'histoire de l'alliance solaire que j'ai moi même déjà rêvée dans les rue de Lagos, mais pas seulement ! Tant d'informations, de questions se bousculent dans ma tête.

Je les repousse de nouveau, il n'est pas encore le temps. J'embrasse la vision, observant ces temps ou la collaboration n'étais pas entachée par les génocides, massacres et trahisons qui eurent lieux tout au long de l'histoire. Un temps temps ou tous purent s'unir pour lutter contre une cause commune. Finalement mon rêve de Mnesis se rappelle à moi, aussi vif et coloré qu'à son apparition. *Nous n'avons pas le choix où ce sera la perte de Gaïa*.

Je prend une grande bouffée d'air, le cœur lourd mais l'esprit déjà à la tâche, et ne dit mot. Je n'ai rien à dire, je suis déjà engagée sur ce chemin que j'ai arpenté de mon grès où nom. A croire que toute mon histoire menait ici. Mon regard plonge dans celui du Loup qui prend la parole le premier testant sa résolution, puis dans celui du Lion qui n'à encore rien dit. Lui qui fait partis du Pride de Black Tooth risque d'avoir des choix à faire, son Bon Bhat sera t'il volontaire pour nous aider ou choisiras t'il une autre voie, plus couarde ? Visiblement j'attend sa réponse avant de me prononcer, une nouvelle fois, devant papa Opeyemi.

Il y a des signes qui ne trompent pas. J'ai su qu'une cérémonie aurait lieu juste avant même qu'il appelle Maman Abigail.
Je me serais bien passé d'un rituel en la présence de ce blanc, mais je suis l'hôte de papa Opeyemi et en cela je n'ai rien à dire. Je m'agenouille donc, les pieds à plat sur lesquels je viens m'assoir. Cette position, en plus d'être rituelle, permet de se relever rapidement, plus rapidement que la position adopté par le loup et la femme dragon, déformation de mes années auprès de Black Tooth.

Sans hésitation, j'embrase les herbes et hume la fumée que cela provoque. Leur odeur capiteuse happe mon odorat et sans aucun doute ouvre mon esprit. Je regarde les visions se succéder, me faisant ressentir joie, gloire, peine et effroi. Je vis le courage de nos ancêtres et leur finale victoire, et cela emplie mon coeur de bonheur et de gloire.

Et puis les visions se firent fugaces puis disparurent, nous laissant de nouveau les uns face aux autres avec plus de questions maintenant qu'avant, bien que j'y ai trouvé une réponse à ma propre interrogation.


*J'ai eu raison de suivre ce sentier. En espérant que ça ne me conduise pas à ma perte.*

Pourtant c'est le loup qui le premier parle, montrant encore une fois l'arrogance de son double héritage. Et je fais un effort pour ne pas le couper immédiatement. Effort que je consens par respect pour l'ancien. Et c'est encore par respect pour le deuil de Nihahsah que je ne hausse pas le ton lorsque je prends la parole en regardant le vieux Opeyemi, et pourtant une certaine tension se fait entendre.

Les temps que la mémoire des vôtres nous a montré étaient les temps bénis avant la trahison. Ce moment où les loups ont chassé tous les féra par orgueil, oubliant ce qu'ils étaient.
C'était un temps avant que l'homme blanc ne vienne piller et détruire l'Afrique, amenant mort et misère aux nôtres, humains ou animaux.
Aujourd'hui se présente devant nous un homme qui porte ces deux héritages. Je respecte la mort de sa compagne, mais elle n'égalera jamais les morts que les siens ont causé.
J'ai conscience que cette alliance solaire est une nécessité, et même un devoir. Seline m'a montré un chemin que je suivrais le coeur haut.
Mais dîtes moi pourquoi? Pourquoi ce loup, qui porte le double héritage de ceux qui spolièrent l'Afrique, devrait en faire partie? Je comprends l'union que représente l'alliance solaire, mais tournons nous vers les Kucha Ekundu, qui au moins jamais ne vinrent en conquérant sur nos terres et ne le firent pas pour apporter le sang et la mort à une époque où les ancêtres de cet homme le faisaient, sûr de leur bon droit tant l'orgueil les aveuglait.

Je marque un instant de silence avant de reprendre

Je respecte le sacrifice de sa compagne, et elle aura le droit à une sépulture et un rite comme chaque guerrier y a le droit. Et j'ai bien conscience que le chemin que je vais arpenter m'éloignera de mon Pride qui suit une route bien différente qui nous amènera en conflit. J'essaierai de lui faire entendre raison, mais je crois que Black Tooth est devenu aveugle lui aussi.

Les paroles de l'homme m'arrachent un soupir et je secoue lentement la tête de dépit en les écoutant. Même si elles ne sont en rien surprenantes, c'est sans doute justement leur inéluctabilité mais aussi la façon dont elles viennent qui les rendent à mes yeux aussi pénibles à entendre, car elles montrent à quel point le fossé est immense, à quel point le Ver s'est installé et a peut-être même nourri nos divisions, à quel point si certains faits sont malheureusement bien réels, nombre de raccourcis trop simplistes et de contre-vérités ont trouvé naissance dans ces fractures.

Après un bref regard vers le vieil Opeyemi, je reprends donc la parole, d'une voix ferme mais que je veux néanmoins conciliante, car je ne souhaiterais pour rien au monde envenimer davantage des échanges qui déjà promettent de s'avérer plus que compliqués.

J'ai été présenté, mais je n'ai pas entendu votre nom... dis-je en m'adressant à celui qui manifestement, suite à l'histoire qui vient d'être contée, ne peut être que le lion.
Et sans doute avez-vous mal été renseigné, mais les racines de ma tribu sont tout aussi africaines que les vôtres, voyez-vous.
Après une hésitation, je choisis de m'arrêter là, chaque parole étant susceptible de déclencher des réactions inattendues, ce qu'en tant que Galliard je sais parfaitement.

Alors que les derniers résidus d’herbes s’envolent en fines parcelles lumineuses des récipients sous l’effet du vent léger qui vient de se lever sur la lagune, la tension monte brusquement dans le petit cercle que vous formez. Tant de sentiments contradictoires semblent s’animer en vous. Avant que le ton ne s’enflamme encore un peu plus, le vieil Opeyemi émet comme une sorte de sifflement rauque de gorge, qui pourrait se traduire aussi bien comme du dépit que par une mise en garde. Il réajuste sa position assise, puis ses paupières s’ouvrent à nouveau sur ses yeux aveugles.

- Je puis sentir l’éducation imprimée en toi par ton Bon Baht, jeune lion. Black Tooth n’est pas réputé pour sa tolérance à l’égard des autres. Il te faut ouvrir les yeux pendant que tu le peux encore…, court instant durant lequel un sourire amusé joue sur les lèvres du vieux Mokolé. Oui, les lupins sont coupables d’avoir entraîné les Feras dans la Guerre de la Rage, un guerre destructrice dont personne aujourd’hui ne peut ignorer qu’elle fut déclenchée sous l’influence du Grand Destructeur. Seuls certains extrémistes parmi les lupins continuent à ignorer cet état de fait. Mais tous les loups ne sont pas à leur instar, certains ont compris que seuls ils ne réussiront pas à se lever face à l’Apocalypse qui se dresse à présent sur la Terre-mère. Je connais celle qui vous a envoyé ici, jeune Gipsy, comme si cela voulait tout dire pour lui.

Effet volontaire ou non, l’ardeur du feu semble s’infléchir quand Opeyemi poursuit, et son visage est clairement orienté vers Dajan :

- Notre terre d’Afrique parle. Son chant se promène de l’eau des puissants fleuves aux hautes herbes des savanes, des arbres centenaires de la forêt au sable aride des déserts. Et son chant dit que Black Tooth impose son règne par la force à ceux qui n’en veulent pas. La terre dit qu’il s’est lancé dans une politique d’extermination des Ajaba, qu’il a juré d’en détruire chacun des membres… Cela ne te rappelle-t-il pas quelque chose ? Allons, ne te montres pas si prompt à juger ceux dont l’aspect est différent du tien, et à placer ta confiance dans ceux qui te ressemblent. L’enveloppe n’est qu’apparence, mais ce loup a sûrement plus en commun avec toi, que ton Bon Bhat… A nouveau un sourire malicieux joue sur les lèvres du vieux, conscient qu’il est du blasphème que ses mots doivent représenter pour Dajan.

Reprenant son sérieux, il poursuit :

- Tu es intelligent, jeune Dajan. La venue de Black Tooth n’est aucunement une coïncidence à l’heure où s’éveille une puissance incommensurable. Et je pressens que les objectifs du vieux lion sont tout autres que l'ambition de  faire renaître l’Alliance Solaire. Il est dit que pour affermir son règne, Black Tooth aurait pactisé avec des entités corrompues. Je n’ose imaginer ce qu’il adviendrait si celui-ci cherchait à exercer sa volonté sur l’Esprit qui s’apprête à être éveillé.

Sa tête se secoue légèrement dans un signe de dénégation, avant de se tourner vers Nihahsah :

- Tu es en deuil ma fille, et en cela je comprends ton silence. Mais l’affaire qui nous concerne mérite ton attention. Ne déçois pas celui-qui-a-rejoint-la-Mnesis en te détachant de tout ce qu’il a entreprit avant d'en mourir.

Je ne peux que comprendre la réaction épidermique de Dajan et je la partage. Non seulement mon peuple à été presque éradiqué par les Garou, mais en plus j'ai le devoir de me souvenir de cette époque difficile. Néanmoins il faut se rendre à l'évidence ce qui se passe nous dépasse, et nous allons devoir faire montre d'ouverture d'esprit, car si nous échouons dans la quête qui nous est confié, nous risquons de condamner de nombreuses vies.

Les paroles de Papa Opeyemi me semble presque trop tendre envers le loup mais justes malgré tout, et ce qu'il soulève concernant Black Tooth ne viens que confirmer mes propres réflexion à l'encontre de ce Simba. Lorsqu'il s'adresse à moi je ne suis guère étonnée, juste... dépassée par les événements qui s'enchaînent. Finalement je prend une grande inspiration et l'expire avant de prendre à mon tour la parole répondant à Papa Opeyemi d'une voix décidée et d'un discours vibrant.

Oui Papa Opeyemi, je vais faire de mon mieux pour honorer sa mémoire et montrer à tous que le rêve de Gaïa n'est pas mort.
Je tourne mon regard en direction de Dajan, mais aussi de notre compagnon d'infortune, Gipsy.
Je comprend ton raisonnement Dajan, et je comprend pourquoi aussi. Ce ne sera pas facile de mettre de côté le ressentiment mais une grande tâche nous attend,sans nous, dis-je en nous englobant tout les trois du bras, l'Afrique est perdue, si nous sommes désunis alors nous somme déjà mort. J'ai vu...Dis-je presque en chuchotant, j'ai vu l'alliance solaire et j'ai vu ce qu'elle à combattu. J'ai vécu l'espace d'un instant ce combat... Et nous ne pouvons pas permettre que cela se reproduise, nous devons tout faire pour l'arrêter même si cela veux dire devoir composer avec les erreurs du passé.

J'attend quelques secondes avant de continuer.
Ce que soulève Papa Opeyemi est important et nous en parlerons. Mais avant toute chose, Dajan, Gypsi, j'ai besoin de savoir si vous êtes prets à vous battre au nom de Gaïa, au nom de la renaissance de l'Alliance Solaire, de porter avec moi cet Héritage ?
Chaque mot de cette phrase semble avoir été coulé l'espace du temps, comme s'ils étaient l'échos d'un chant ancien et fabuleux à la foi. L'on peut voir en moi une Nihahsah décidée à contrer le sort sombre qui est jeté sur l'Afrique, envers et contre tous.

Silencieusement j'ai écouté les longs reproches du vieux lézard. A plusieurs reprises j'ai voulu intervenir, lui couper la parole, mais on m'a appris qu'on ne rugissait pas à la face des autres comme on le faisait dans la savane. On peut néanmoins lire le feu qui m'anime dans mon regard qui ne décroche pas un instant. D'ailleurs on pourrait croire que je suis une statue tant je ne bouge pas d'un pouce, mais mon regard me trahirait.

Après ce fut au tour de Nihahsah de parler. Comme à chaque fois qu'elle évoque sa mémoire et le "don" qui est fait aux siens de revivre le passé, je ne comprends pas forcément tout. Elle a vécu un combat qui a eu lieu alors qu'elle n'était pas née, c'est étrange. Mais encore une fois j'écoute et ne dis rien.

Lorsque le silence se fait de nouveau, j'estime que j'ai le droit de parler avant le loup. Après tout, je suis ici sur le sol des miens, et puis je suis un lion.
Je tourne tout d'abord mon attention vers Opeyemi

Papa, crois tu que si.... j'ignorais ces choses je serais ici? Je ne sais même pas si Nihahsah le serait car mon Pride, ou plutôt mon ancien Pride, se serait occupé d'elle.
J'ai décidé de trahir les miens pour suivre le chemin sur lequel Seline m'a mis. Alors pas besoin de me faire la leçon. Je sais très bien ce que Black Tooth fait à ses ennemis!.... alors aux traitres...

Je porte alors le regard sur Nihahsah

Comme je viens de le dire, je serais à tes côtés, quelqu'en soit le prix. Ma décision était déjà prise lorsque je suis venu te prévenir pour Korben. Pour les miens je serais maintenant un Naa et pourtant je sens que j'ai raison.

Puis enfin je regarde l'européen,

Papa Opeyemi te fait confiance. Tu as combattu au côté de Nihahsah. Et même si ça n'enlève rien à ce que les tiens avez fait, il est vrai que le fils ne peut être responsable des actes du père. Cependant je n'oublies pas. Nous combattrons côtes à côtes, mais trahis nous et les vautours se repaitrons de ta carcasse.

Aussi étonnant que cela puisse être il n'y a aucune agressivité dans ma voix, un peu comme si j'énonçais une évidence ou un fait acquis.

Je reviens porter mon attention sur Opeyemi et Nihahsah

Après mon combat face à Corben, je me suis réveillé dans une "cabane" abandonnée. Et j'ai rencontré une dénommée Noomi. C'est elle qui m'a dit que je te retrouverai ici. Elle a aussi parlé du réveil d'une puissance oublié, surement ce que l'Alliance a combattu. C'est une Ananasi et d'après elle nous n'arriverons à rien sans elles.

J'écoute patiemment les paroles fortes et prenantes qui emplissent l'atmosphère, car en l'instant présent chacun est conscient de la solennité du moment, et du poids des mots.

Lorsque la charismatique jeune femme avec qui je n'avais guère pu réellement échanger jusqu'à présent, compte tenu des circonstances, s'ouvre sur les étranges visions qui l'ont saisies, qu'elle évoque son chemin, ses espoirs et sa conviction quant au chemin qui est le sien, je ne peux qu'opiner du chef doucement, découvrant un peu plus de sa personnalité au-delà des conflits et des tragédies qui ont déjà parsemé notre chemin - pourtant court - en commun.

Je n'ai pas cherché à prendre la parole ensuite. Je connais les êtres vivants d'où qu'ils viennent, et je sais reconnaître les êtres fiers avec lesquels il faut savoir parfois ménager les egos pour faciliter les choses.
C'est donc sans surprise que mon nouvel ami Simba s'engage après la Mokolé dans des explications qui témoignent surtout de sa gêne devant la déchéance de son "pride", qui sonne à mes oreilles comme sa meute, qui l'a conduit sur son chemin actuel, en rupture de ban pour rester fidèle à ses convictions.

Oui, je reconnais que sa fierté a dû être une arme en cette occasion, pour l'aider à rester ferme dans ses convictions et à ne point reculer. C'est du moins ce que je me dis, ravalant le sourire qui commençait à s'inscrire sur mes lèvres mais qui pourrait être mal interprété compte tenu de ses a priori contre moi - ce qui serait vraiment regrettable.

Je le laisse terminer, laissant glisser ses vaines menaces comme une mauvaise pluie d'orage. Tout cela résonne davantage comme une sorte d'excuse quant au fait de m'accepter, une façon de se dédouaner aux yeux des autres sans doute. Du moins est-ce ce que je ne peux m'empêcher de penser.

Après un court silence, laissant l'attention de l'assistance se porter sur moi sans même y prendre garde, d'une voix grave et réfléchie je déclare, en regardant Nihahsah, puis Papa Opeyemi, et enfin Dajan.
Je suis venu au nom de cette Alliance. Elle est le sens, la raison de ma présence parmi vous. Vous pouvez donc compter sur moi, bien entendu.

Je baisse les yeux, avant de les relever et de poser le regard sur Nihahsah.
Nous n'avons pas eu le temps de parler de ce qui vient de se produire dans l'entrepôt, il faudra prendre le temps de le faire je pense...

Tandis que le chant nocturne de la forêt occupe les quelques espaces de silence que vous laissez dans ce premier échange, le vieux Opeyemi a hoché la tête à nombre de vos propos, appuyant sa bienveillance avec un « huhuN » de gorge notamment lors vos accords respectifs sur  la renaissance de l’Alliance Solaire. Ces interventions se sont limitées à cela jusqu’à ce que Gipsy en termine. Il se redresse alors de sa position légèrement voûtée et un sourire grave s’imprime sur ses lèvres.

- Ainsi tu as rencontré la mystérieuse Noomi, dit-il à l’intention de Dajan. Il laisse passer quelques secondes de silence durant lequel son sourire devient celui d’un carnassier. Oui, l’araignée peut-être une aide précieuse, mais les objectifs de la Reine Ananasa sont souvent détachés de ceux des enfants de la Terre-mère. Il vous faut en savoir plus, et si possible vous faire une alliée d’elle.

A nouveau il laisse retomber un long silence, au point où vous vous demandez s’il vous cède la parole ou, pire, s’il s’est endormi. Il reprend pourtant la parole :

- Dites m’en plus sur ce que qu’il s’est passé, ce que vous avez vu ?

La fraîcheur nocturne, même sous les tropiques, vient doucement vous saisir et rend plus appréciable encore la chaleur diffuse des braises autour desquelles vous formez votre cercle.

Je hoche la tête au conclusion de l'ancien sur l'araignée.

Oui, elle me semble.... pas totalement nette.

Puis sa question me laisse perplexe. J'ouvre et ferme la bouche comme si je cherchais la réponse à dire et que je me rendais compte que ce que je vais avancer sera ridicule et inutile.
Mon regard glisse alors sur mes nouveaux compagnons et s'arrêtent sur la mokolé. Au même moment je semble réaliser quelque chose, la question ne m'est pas adressée.

Je me réinstalle donc, prête à écouter plus en détail ce qu'elle a à dire, car dedans recèlera peut-être quelque chose qui résonnera en moi.

Aux réponses qui me sont donnée j'affiche un air satisfait. Je ne suis pas souriante, non, la mort de mon frère teinte mon cœur d'un voile de chagrin qui même si je l'enferme derrière une porte, est toujours la.

Le réponse de Dajan aurait presque pu m'arracher un ricanement... *C'est une Ananasi, comment pourrait-il en être autrement ?*

Je prend une grande respiration, appréciant le calme dans lequel nous nous trouvons... L'oeil du cyclone. Bientôt le monde va devenir fou, il l'est déjà, mais je sais qu'une escalade de violence nous attends plus nous nous approcherons du but, les derniers jours l'ont prouvés.

A la demande de papa Opeyemi je tourne mon regard vers le Loup. Visiblement j'attend qu'il décrivent avec précision ce qui c'est passé, peut être le fait qu'il soit celui qui ai découvert mon frère y est pour quelque chose...

Je souris simplement lorsque le regard de Nihahsah se porte sur moi, après qu’elle-même ait été invitée par Dajan de la même manière à s’exprimer la première.
Je me dandine légèrement dans ma position assise, pas par inconfort mais plutôt pour me pencher un peu plus avant, afin de mieux capter l’attention de mon auditoire, ce dont j’ai manifestement l’habitude, même (ou surtout) s’agissant d’inconnus ou peu s’en faut.
Mon regard pétille en arpentant les méandres de mes souvenirs, mes yeux vivaces témoignent d’un grand appétit pour la vie, la découverte, un aspect enjoué, le tout mâtiné d’une force de personnalité silencieuse mais forte et profondément ancrée, et aussi, d’une indéfinissable impression de tristesse et d’arrachement.
Je me racle légèrement la gorge et je bascule mon attention d’une personne à l’autre, avant de commencer à parler, de ma voix mélodieuse, chaude et captivante.

Mon histoire cette fois-ci démarre loin d’ici, au Sept de la Pierre Dressée, lors d’une assemblée de ceux qui comme moi sont nés sous l’auspice de la lune gibbeuse.
Pattes-Agiles, le maître de la cérémonie, nous a conté de nouveau la Prophétie de Hérisson, selon laquelle l’Apocalypse est en marche, et celle-ci ne pourra être évitée, au moins pour cette fois, que par le rétablissement des anciennes alliances.
Selon les mots du Chante-conte, la prophétie a pris des accents criants de vérité dans les faits – mais qui pourrait en douter ? - .
Le Société Total est depuis longtemps surveillée en raison de ses activités et de son rôle dans l’extension de l’influence du Ver depuis des années. Or, un certain Matthieu de Portzac, identifié comme l’un des responsables de cet état de fait, est venu d’urgence à Akpo, ici au Nigéria, suite à un appel dont le contenu peut se résumer à « le réveil est proche ».

Je m’interromps un instant pour reprendre mon souffle et avaler ma salive, moi-même pris par mon récit et l’évocation de ses souvenirs pourtant récents mais qui semblent remonter à une petite éternité.
Compte tenu des relations qui nous… hum… « unissent », disons, dis-je avec une pointe d’ironie, il n’était pas question d’envoyer une meute entière, ce qui certainement aurait été plutôt mal perçu. Je me suis proposé, en quelque sorte, pour venir, ainsi que Léa, la Louve qui a combattu et péri dans l’entrepôt.
Cette fois, mon ton redevient l’espace d’un instant morne et triste, comme si j’avais moi-même brisé le cours de mon histoire à cette évocation.
Je me gratte le nez négligemment, les yeux dans le vague, puis me reprends, laissant revenir mon air chaleureux habituel.

Charlène Cœur-Mystère, la dirigeante du Sept qui accueillait l’assemblée, nous a ouvert un pont de lune pour nous permettre de faire le voyage rapidement, nous confiant qu’un vieil ami à elle devait nous attendre de l’autre côté.
Léa et moi sommes arrivés dans l’entrepôt, mais tout de suite nous avons compris que quelque chose n’allait pas. Le silence régnait, un silence de mort, les caisses étaient dispersées dans un désordre anarchique, et l’odeur du sang flottait sur l’endroit. Et l’odeur fétide de la corruption du Ver s’étendait partout…

Je regarde ensuite Nihahsah, d’un air doux et compatissant.
C’est là qu’en fouillant un peu, remontant l’odeur de sang, j’ai trouvé un jeune homme allongé entre deux caisses, mortellement blessé. Il n’a eu le temps que de prononcer quelques mots avant de s’éteindre : « Piégé… Ma sœur… Danger… Aidez-la… La mémoire est la clef… »
Son dernier effort a été de me tendre un téléphone portable avec un numéro tapé dessus, que j’ai mémorisé, et que voilà [Numéro de téléphone].
Mais tout de suite les lumières se sont allumées et un homme a fait irruption sur la plateforme supérieure.
Il nous a dit, précisément « Voilà donc ce que mon fils attendait. Des renforts. J’avoue être surpris par la nature des alliés qu’il a cherché, mais cela ne change pas grand-chose. »
Ensuite… Et bien il a ordonné à ses hommes de nous tuer, Léa et moi avons réussi à les avoir mais nous nous sommes séparés.
J’ai rencontré Nihahsah pour la première fois peu après, les Fomoris ont continué leur offensive mortelle, et Léa est tombée en allant dans l’Umbra, infestée par la proximité d’une Fosse.

Je me tais un instant, puis termine mon exposé.
Ensuite, et bien nous avons remporté le combat et fui avant l’arrivée de la police, emportant nos morts, avec juste la parenthèse d’avoir croisé cet être énigmatique, peut-être un Rokéa, qui a simplement dit « Qyrl ! » à notre attention avant de disparaître dans les eaux noires.
Quelques temps plus tard, la mère de Nihahsah venait nous chercher pour nous emmener ici. Voilà assez précisément tout ce que je sais.

Je reprends ma position initiale et laisse le temps à mon auditoire d’absorber toutes les informations que je viens de donner, sans rien cacher.

Le temps s'arrête pour moi tandis que Gipsy révèle les paroles de celui qui à tué mon frère - Mon père. Une haine froide se répand dans mon cœur, laissant la rage couler dans chaque recoin de mon être.

Je tourne ma tête en direction de ma mère, et me lève, vide. J'attrape le premier objet qui me passe sous la main et le fracasse contre le sol en poussant un hurlement qui n'à d'humain que les cordes vocales qui lui donnent naissance. Fracasser cette objet ne me procure aucune satisfaction, si ce n'est de penser que ma quête me mènera face à celui qui m'à trahi. Mon hurlement traduit tout ce que je ressent, ma haine, ma colère, la trahison, la tristesse.

Le souffle court je m'écarte le temps de digérer l'information, puis je reviens, le regard froid, le cœur serré en regardant mon frère qui à été abattu par son propre père, seul. Il émane de moi une rage palpable mais je reviens, prête à écouter ce qui doit encore être dit.

Votre hôte paraît à nouveau parfaitement éveillé tandis que Gipsy conte l’histoire qui l’a conduit jusqu’à vous. Bien qu’il reste silencieux, se contentant à l’occasion d’un « hum » occasionnel  appuyé par un hochement de tête, vous le sentez particulièrement attentif. Il s’apprête à prendre la parole, quand il est interrompu par la sortie brutale de Nihahsah. Susilawati, sa mère, est complètement anéantie. Elle murmure pour elle-même avec incompréhension: « … Massango… Ce n’est pas possible… pourquoi ?...».

Le silence retombe sur vous, lourd et pesant. C’est à nouveau la voix rassurante du vieil africain qui résonne au bout d’un court laps de temps.

- Le grand Destructeur a agi en silence et son ombre de corruption s’étend désormais sur notre terre. Il a depuis longtemps perçu que l’emprise des Change-formes sur l’Afrique s’est effilochée. Là où nous étions forts, nos propres dissensions, à l’instar des Tribus de la Nation Garou sur les autres continents. Sa tête se tourne d’abord vers Gipsy, puis vers Dajan. En vérité, la guerre de la Rage nous a séparé des Loups, mais la lutte entre les Ajaba et Black tooth en fait autant de nous autres.

Susiliwati, à présent secouée de sanglots silencieux, paraît à présent déconnectée de la conversation, mais Papa Opeyemi poursuit pourtant :

- C’est de mon fait si Djibril s’est rapproché de Charlène Cœur-mystère, car je pressentais que nous aurions besoin de l’aide des Loups, je l’ai vu dans mes rêves de Mnésis. Mais plus grande est la corruption du Grand Destructeur s’il parvient à présent à s’en prendre à notre propre parentèle.

Il marque une pause.

- Vous devez à présent vous méfier de tous, et ne vous fiez qu’à votre cœur pour poursuivre votre quête. La Terre-Mère se cache parfois dans les âmes les plus inattendues. Suivez votre cœur, car de cela dépendra de beaucoup le réveil de cet esprit du mal.

Il se lève péniblement, en s’appuyant sur l’épaule de Gipsy. Tout sauf un geste hasardeux vous dites-vous, désormais que vous le connaissez.

- Susiliwati, je suis fatigué, mais nous avons à parler. Accompagnes moi pendant que nous laissons les jeunes décider de la voie à suivre pour eux.

En silence, les yeux embués de larmes, la mère de Nihahsah se relève et prend le bras du vieux mokolé pour qu’ils quittent la terrasse où vous êtes toujours réunis.

Je n'ai eu aucune réaction à la bombe qu'a pu être la révélation faite par le loup. Après tout, j'ai grandi au milieu des lion, et il n'est pas rare qu'un père y tue sa progéniture.
Mais là, il y a quelque chose de triste et de maléfique. Et la réaction de Nihahsah me le prouve. Lorsqu'elle jette l'objet je ne dis rien de plus, aucune parole de réconfort ne l'aideront à passer ce cap.

Puis c'est au tour de Papa Opeyemi d'essayer de nous unir par des mots, ne faisant que me rappeler l'une des raisons qui m'ont poussé à quitter mon Pride, et surtout Black Tooth, et ce sans aucune logique sinon le rugissement de ma propre nature et de mon lien avec Selene.

Lorsqu'il se lève, je le regarde sans un mot de plus, mais avec un salue de la tête. Une fois qu'il est rentré, je m'étire longuement et d'une manière assez étrange qui n'est pas sans rappeler les félins, et ce même si je n'en suis pas à le faire à quatre pattes.

Il faut trouver l'araignée et le requin.

Je m'assoie en tailleur, de nouveau, avant de prendre la parole, d'un ton neutre ou couve une colère grondante.

Avec ce que j'ai entendu ce soir nous avons trois pistes majeurs sur lesquelles nous allons avoir à nous concentrernous devons rassembler ce que chacun de nous sait pour pouvoir avancer correctement.  Redressant la tête pour regarder tour à tour le loup et le lion dans les yeux, j'énumère nos possibilités levant un doigt de la main droite pour chacun.
- Le pride de Black Tooth. Nous devons vérifier quelles sont ses intentions et si il y à un fond de vérité sur ces murmures qui susurrent que le grand corrupteur à pris racine en lui... La coïncidence temporelle avec ce qui se passe est trop grande pour être ignorée. Je ne m'explique pas encore pourquoi il souhaite me voir éliminée... Une entrave à ses projets ?

Je lève ensuite un second doigts.
-Total. Ils cherchent apparemment un ou des Mokolés pour collaborer avec eux. Tout ce qui se passe me dit qu'ils doivent avoir besoin de savoir ce qu'à fait l'alliance solaire dans le passé, mais ce n'est qu'une supposition au mieux hasardeuse pour le moment. Ils ont infiltré et détruits ma famille, ils ont essayé de me recruter, sinon de m'abattre ...tout comme le pride de BlackTooth. Mon père leur à offert les secrets de mon peuple, les Mokolé du Nigéria sont en danger tout particulièrement ceux qui vivent ici.

Ils ont un rôle majeur dans la tempête qui se lève. Il y a ce village ou tu m'as trouvé Dajan, c'est même toi qui m'à donné ces informations : Sous couvert d’une mission humanitaire destinée à construire un village et un hôpital pour des populations indigènes dans la forêt, il s’agit en réalité d’une opération financée par le groupe Total, il semblerai qu'il creusent profondément dans le sol, comme une mine à ciel ouvert. Les populations ont été asservies pour participer à l’excavation du site.

Puis un troisième.
- L'alliance solaire. Nous devons oui, retrouver le requin et l'araignée et les gagner à notre cause. Comme un membre de chacun de nos frères et sœurs que Gaïa a bénie de son souffle. Non seulement ça mais... J'hésite un peu, cherchant mes mots avant de continuer. Cette période est un carrefour pour les Mokolés, je n'en comprend pas tout, juste que je serai celle qui portera la faute ou la gloire de l'avenir du futur du Rève-Dragon. Il... Oui, papa Opeyemi m'à parlé d'un vestige de l'alliance Solaire,
Je cite alors les paroles dont je me souviens tandis qu'il me confiait le fétiche :  fouler les terres spirituelles jusqu’à trouver ton chemin vers le reflet de la Terre-mère lorsque nous en étions les Seigneurs. Nous devons... retourner dans un sorte de passé ? Un lieu qui se souviendraient de Gaïa en des temps immémoriaux ? j'ai déjà entendu parler d'un tel endroit dans l'Ombre de velour...

J'écoute avec grande attention les propos de la jeune femme, hochant parfois la tête en signe d'approbation, me contentant le plus souvent de la regarder, le regard posé sur elle, très calme.

Une fois qu'elle a terminé d'exposer ses propositions, je prends la parole posément.
Je souscris à ses propositions. Mais si je puis me permettre, je voudrais vous demander à tous les deux quelque chose.

Je passe de l'un à l'autre avec un regard franc et interrogateur.
Comme je l'ai fait moi-même, j'aimerais qu'à votre tour vous puissiez me dire ce que vous savez en lien avec la situation. Car en écoutant Nihahsah je réalise qu'il me manque bien trop d'éléments pour pouvoir pleinement apporter mon concours dans nos réflexions.

Je regarde le loup, un éclair d'impatience visible dans mes yeux, bien que je n'en laisse rien paraître.
Pour ma part, tout ce que je sais, vous le savez.

Je me retourne alors vers le simba, que j'ai rencontré plusieurs fois, mais de manière brève et épisodique, ce qui ne lui a pas empêché de me sauver la vie, plusieurs fois... Tout comme Gipsy j'attend qu'il nous dise ce qu'il peut savoir qui pourrait nous aider concernant les points abordés.

Après les différentes prises de parole je comprends bien que c'est à moi. Chacun peut voir une certaine nervosité, un peu comme si j'avais des fourmis dans les jambes. Régulièrement mon regard se perd dans le noir alentour avant de revenir se fixer sur vous.

Pour commencer, je ne sais pas ce qu'on est venu faire ici avec mon ancien Pride. Si vous connaissez Black Tooth, même que de réputation, vous savez qu'on ne discute pas ses ordres.

On peut entendre malgré tout un reste d'admiration dans ma voix. Je finis par me lever et tout en continuant à parler, je marche autour de vous, à la lisière de la lumière, presque dans l'ombre de la nuit.

Mais depuis qu'on est arrivé, quelques choses ont évolué. Tout d'abord, il y a l'intérêt qu'il te porte Nihahsah. Et sans vouloir en rajouter à ce moment pénible, ta famille est en danger. Il n'hésitera pas à s'en prendre à elle pour t'avoir. Surtout qu'il a chargé Korben de ça. Je l'ai arrêté une fois, mais ça ne veut rien dire. Bien au contraire.

Le silence s'installe un instant le temps pour moi de me remémorer les griffes de mon ancien frère me labourer le ventre. Mais aussi d'ordonner la suite.

Plutôt que de me retrouver ici à suivre la route que Selene m'a montré, j'aurais dû m'intéresser à Matthieu de Harcourt. Un Alpha de Total venu sur nos terres pour diriger Akpo, un projet de forage pétrolier au large de Lagos. Mais Total est aussi lié à une mine, ce qui est bizarre d'apres Black Tooth. Et ce Mathieu de Harcourt lié au Grand Corrupteur. Pour l'instant je n'ai eu que son numéro de téléphone.
Lorsque je me suis réveillé, j'ai vu que j'avais essayé de l'appeler, mais je ne garde aucun souvenir de ça. Donc pour l'instant c'est tout.

Et il reste cette Noomi. Au moins elle, on devrait pourvoir la retrouver sans trop de difficulté.

Je finis par m'arrêter, mais je ne rejoins pas ma place initiale, je m'accroupi là, à moitié dans le noir, prêt à bondir au besoin, mais surtout, il est visible que quelque chose me gêne.

J'écoute le Simba relater principalement des choses que je sais déjà, mais je le laisse faire, cela permettant à Gypsi de se mettre à la page concernant ce qui se passe ici.
Une fois le récit fini je me tourne vers lui un sourcil levé, insistante, signifiant clairement : "Mieux ?"

Finalement en voyant le cirque de Dajan je lui demande, Quoi ?